Le Cas’Nard

Journal de Bernard Martial

© Bernard MARTIAL – août 2014


LES CHOEPHORES (Χοηφόροι ou Χοηφόρες) d’Eschyle (Résumé et citations)

mercredi 3 août 2011, par Bernard MARTIAL

Toutes les versions de cet article :

  • français

Résumé et sélection de citations établis par Bernard Martial (professeur de lettres en CPGE)

(Edition de référence : GF n°1473. Présentation de Marie-Joséphine Werlings. Traduction de Daniel Loayza)
(Entre ( ) numéros des pages dans cette édition, entre [ ] notes et commentaires)

Personnages :
ORESTE, fils du roi défunt d’Argos, Agamemnon
PYLADE, ami d’Oreste, fils de Strophios de Phocide
LE CHŒUR, composé de captives, servantes du palais d’Agamemnon
ELECTRE, fille d’Agamemnon et sœur d’Oreste
UN ESCLAVE DU PALAIS
CLYTEMNESTRE, mère d’Oreste et d’Electre, concubine d’Egisthe après avoir tué son mari Agamemnon
KILISSA, la nourrice d’Oreste
EGISTHE, cousin d’Agamemnon, concubin de Clytemnestre et usurpateur du trône
UN SERVITEUR DU PALAIS

La scène est à Argos, aux abords du palais d’Agamemnon.

PROLOGUE

Oreste et Pylade, auprès du tertre funéraire d’Agamemnon.


Oreste, qui est de retour dans son pays, implore l’aide d’Hermès. Il veut venger son père qui a succombé sous les ruses secrètes d’une femme. Au pied de son tombeau, il lance un appel à son père, offre une boucle de cheveux au fleuve Inachos et une autre comme offrande funèbre (9). Il n’était pas là quand son père est mort.
Il voit un cortège de femmes en noir et se demande à quel malheur nouveau il doit s’attendre à moins qu’elles n’apportent des libations à son père. Il reconnaît sa sœur Electre et implore le soutien de Zeus.
« Retirons-nous Pylade. Je veux apprendre clairement ce que veut dire cette troupe de suppliantes ».

Ils sortent.


PARODOS


Entrée d’Electre et du chœur.


Strophe 1 : Le chœur des captives est envoyé du palais et escorte les libations des scarifications que leurs ongles imposent à leurs joues (10), des larmes et des déchirures de leurs vêtements sur leur poitrine…
Antistrophe 1 : … car leurs cheveux se sont dressés quand un cauchemar, un rêve prémonitoire [celui de Clytemnestre], s’est introduit en pleine nuit dans la chambre des femmes. Ceux qui interprètent les rêves ont dit la colère des morts contre les meurtriers.
Strophe 2 : Le chœur a été envoyé ici par « une femme impie » mais il tremble de prononcer cette parole : « Le sang répandu sur le sol, comment serait-il racheté ? ». La pénombre recouvre le palais dont le maître est mort.
Antistrophe 2 : Le respect a disparu. La crainte (11) règne et les mortels ont élevé le succès au-dessus de la divinité. Certains crimes sont punis immédiatement, pour d’autres le châtiment est différé.
« Mais il en est que le plateau de la JUSTICE
surprend presque aussitôt dans la clarté ;
d’autres peines dans l’intervalle d’ombre
attendent de mûrir avec le temps ;
d’autres sont détenues par la nuit irréelle ; »
Strophe 3 : Mais la terre a retenu le sang du meurtre et la ruine du coupable est inexorable.
« mais à travers le sang qu’a bu la terre nourricière
s’est figé le meurtre vengeur sans s’écouler –
lancinante et perçante est la ruine
du coupable quand l’infection gagne et foisonne. »
Antistophe 3 : Toucher le seuil d’une épousée est un mal sans remède ; tous les flots réunissant leurs cours sur l’homme aux mains souillées en laveraient en vain le crime.
Epode : Soumises à la contrainte dont les dieux ont encerclé leur ville, les captives qu’ils ont conduites au destin d’esclaves loin de chez elles, doivent s’incliner « devant les volontés justes ou injustes » qu’on leur impose de force. Elles s’efforcent de dominer leur haine. Pourtant elles pleurent sous leurs voiles le sort aveugle de leurs maîtres et leur douleur cachée les glace. (12)

PREMIER EPISODE


Electre demande aux captives qui l’accompagnent dans ce cortège suppliant ce qu’elle doit déclarer en répandant la libation funèbre. Peut-elle oser prier son père en disant de la part de sa mère : « d’une épouse chérie à son époux chéri j’apporte cette offrande », lui demander pour ceux qui envoient ces présents un présent « digne de leurs crimes » ou, au contraire, garder le silence et repartir en jetant le vase souillé après avoir répandu les libations ? Elle invite ses amies à prendre part à son débat puisqu’au palais elles partagent la même haine. Qu’elles parlent sans crainte.
Le coryphée, qui vénère comme un temple la tombe de son père, va lui dire sa pensée (13). Elle doit prier en versant sa libation pour ceux qui aiment Agamemnon et qui détestent Egisthe (Electre et les captives). Elle doit se souvenir d’Oreste même s’il est loin et des coupables du meurtre.
« Le coryphée : - Que se lève contre eux soit un esprit, soit un mortel –
Electre : - Est-ce un juge, un justicier que tu veux dire ?
Le coryphée : - En un mot, celui qui les tuera à leur tour. »
(14)
Electre veut savoir si elle peut faire cette prière sans impiété. « Aux ennemis, tu peux prier de rendre mal pour mal » répond le coryphée.
Electre demande à Hermès d’aller porter son message aux esprits souterrains qui veillent sur la tombe de son père. Puis elle invoque les mânes de son père : qu’il ait pitié d’elle et de son cher Oreste que Clytemnestre a vendus en échange d’un homme complice de sa mort. Sa vie est celle d’une esclave et Oreste est en exil, privé de ses biens alors que ce couple arrogant jouit sans retenue du fruit des épreuves d’Agamemnon. « Mais qu’une heureuse chance ramène ici Oreste » (15) et que son père lui accorde à elle-même un esprit plus sensé et une main plus pieuse que sa mère. Et pour leurs ennemis,
« mon père, que paraisse ton vengeur,
que sa JUSTICE mette à mort les meurtriers.
Au milieu de cette prière pour le mieux,
voilà pour eux le sort maudit que je prononce ;
mais nous, envoie-nous tes faveurs du royaume d’en bas,
avec les dieux, avec la Terre et la JUSTICE victorieuse. »
Puis Electre verse ses libations et demande aux captives d’entonner le péan du mort [chant adressé à Apollon].
Le chœur chante le péan d’Agamemnon : pour laver la tache abominable qu’un homme vienne délivrer le palais avec sa lance et son épée. (16)
Electre remarque une chose imprévue et en fait part au coryphée : elle voit une boucle de cheveux sur la tombe de son père. A part elle, personne n’a pu le faire (surtout pas les criminels). Ces cheveux sont de la même couleur que les siens (17). « Serait-ce un don secret d’Oreste ? » dit le coryphée « il aurait donc osé venir ? » Electre émet l’hypothèse qu’il l’a peut-être fait porter en hommage à son père. Le coryphée pleure à l’idée qu’il puisse ne plus jamais fouler ce sol.
Colère et larmes d’Electre : cette boucle coupée ne peut pas venir de sa mère qui se montre indigne par l’impiété qu’elle témoigne à ses enfants. Qu’un messager lui dise clairement si cette mèche vient d’Oreste pour qu’elle sache si elle doit la jeter (18) ou se réjouir qu’un parent qui partage son deuil ait honoré la tombe de son père. Elle en appelle aux dieux qui seuls savent la destinée. Un autre signe attire son attention : des empreintes de pas semblables aux siennes. Un homme et son compagnon de voyage ont marché ici.

Entrent Oreste et Pylade.


Oreste s’adresse à Electre qui ne le reconnaît pas : que les prières qu’elle adresse aux dieux se réalisent, elle voit celui qu’elle priait tant de voir, il sait qu’elle attend Oreste avec passion. (19)
Electre ne comprend pas. « C’est moi. Ne cherche pas un mortel plus chéri » dit Oreste mais Electre croit à la ruse d’un étranger. Oreste constate alors qu’elle ne le connaît pas quand elle le voit mais qu’elle a reconnu la boucle funèbre. Il lui montre à quel endroit il a coupé la mèche et un tissu qu’elle a confectionné illustrant une scène de chasse (20). « Contiens ta joie, ne sois pas égarée- car je connais la haine de ceux qui devaient nous aimer ».
Electre demande à Oreste qui détient les quatre parts de son cœur (à la fois frère, époux, père et mère) de rentrer en possession du foyer de son père. Elle évoque Iphigénie [la seule fois dans la trilogie]. Grâce à lui, elle va retrouver le respect si Zeus veut bien s’unir à la Force et au Droit.
Oreste adresse une prière à Zeus. Il doit aider à rétablir cette lignée pour garder la confiance des hommes [allégorie de l’aigle victime d’une vipère] (21) et à relever la puissance abattue de leur palais.
Le coryphée leur conseille de se taire de peur qu’on ne rapporte leurs propos au palais mais se réjouit à l’idée de voir se consumer le cadavre des meurtriers.
Oreste dit que Loxias (Apollon) ne le trahira pas, lui qui l’a menacé des pires tourments s’il ne traitait pas les meurtriers de son père comme ils l’on traité « rendant meurtre pour meurtre » (22). Loxias a montré aux mortels les moyens de calmer sous terre la rancune des morts mais il a aussi annoncé la vengeance des Erinyes qui chassent le corps souillé par le meurtre de la cité. Un tel homme est condamné à l’errance et à la solitude. « De tels oracles, ne faut-il pas y croire ? » Et même s’il n’y croit pas, l’œuvre doit s’accomplir puisque tant de désirs visent le même but : les ordres d’Apollon, le deuil de son père, le dénuement qui le déchire, le sort de ses concitoyens soumis à ce couple de femmes (23) [Egisthe est identifié à une femme].

KOMMOS

Le coryphée implore les Moires, déesses du destin que, selon le Droit ancien, la mort venge la mort.
« Déesses du destin, qu’au nom de Zeus
cela s’achève
selon la voie où s’engage le Droit.
Le mot de haine qu’il soit payé
d’un mot de haine – voilà ce que proclame
La JUSTICE, qui exige ce qu’on lui doit.
Qu’un coup mortel acquitte
le coup mortel ; souffre selon ton acte –
trois fois vieille est la sentence qui l’affirme. »
Strophe 1 : Oreste demande quelle parole ou quelle offrande redonnera la vie à son père. Une glorieuse plainte peut relier ces deux mondes si différents que sont l’ici-bas et l’au-delà.
Strophe 2 : Le chœur se fait le porte-parole d’Agamemnon : la mort n’éteint pas l’esprit et la colère du défunt. « Que la victime soit pleurée (24) et son vengeur se manifeste. Le père qui t’a engendré, ta juste plainte peut l’atteindre et ton trouble est assez large et profond ».
Antistrophe 1 : Electre évoque la plainte des deux enfants sur le tombeau. Pour le coryphée, il suffirait qu’un dieu le décide pour qu’un péan victorieux remplace le thrène sur la tombe. [ thrène : chant de deuil]
Strophe 3 : Oreste regrette que son père n’ait pas eu une mort glorieuse sous les murs de Troie. Il aurait légué la gloire à son palais et à ses enfants une vie enviée de tous. Il jouirait au-delà des mers (25) d’un vaste tombeau qui pèserait moins lourd sur la maison.
Antistrophe 2 : Le chœur complète l’idée d’Oreste. Il serait aimé dans la mort par ses autres amis tombés comme lui glorieusement.
Antistrophe 3 : Electre aurait encore mieux aimé que les meurtriers de son père succombent à sa place à Troie. Cette nouvelle leur aurait épargné ces épreuves. Le coryphée rappelle que leurs souhaits sont impossibles. Agamemnon est bel et bien mort et le pouvoir est entre des mains sanguinaires (26).
Strophe 4 : Oreste répond que la vérité est douloureuse mais que la vengeance de Zeus va s’accomplir.
Strophe 5 : Le chœur souhaite enfin pousser son cri de haine contre Egisthe et Clytemnestre.
Antistrophe 4 : Zeus en appelle à la vengeance de Zeus.
« Zeus, quand abattras-tu
la vigueur de ton bras ?
Ah, viens briser des têtes,
donne ce gage à mon pays.
JUSTICE contre l’INJUSTICE,
entendez-moi, ô Terre et nobles dieux d’en bas. »
Le coryphée ajoute que le sang appelle le sang et que le meurtre mobilise la vengeance de l’Erinye.
« Mais l’averse de sang qui imprègne le sol
réclame un autre sang. Telle est la loi. »
(27)
Strophe 6 : Oreste invite les souverains des ombres et les Arai à compatir à la détresse des derniers Atrides et demande à Zeus où ils doivent se tourner.
Antistrophe 5 : Le coryphée évoque sa douleur, son impatience et son espoir de voir s’accomplir la vengeance.
Antistrophe 6 : Electre veut parler avec justesse des souffrances qu’ils doivent à leur mère qui l’a transformée en loup sanglant.
Strophe 7 : Le chœur décrit ses mortifications dignes d’une pleureuse kissienne. (28)
Strophe 8 : Cri de douleur d’Electre contre sa mère qui a enseveli son époux sans une larme.
Strophe 9 : Oreste atteste de sa double détermination à tuer sa mère pour venger le sort indigne réservé à ton père.
Antistrophe 9 : Le chœur rappelle le maskhalismos [amputation des extrémités de la victime] que Clytemnestre a fait subir au cadavre d’Agamemnon.
Antistrophe 7 : Electre veut parler de son sort malheureux de captive éplorée (29). Que le chœur entende sa plainte et l’écrive dans son cœur.
Antistrophe 8 : Le chœur conseille à Electre d’expliciter sa plainte et de rester inflexible dans le combat.
Strophe 10 : Oreste, Electre et le chœur appellent Agamemnon à leur aide contre l’ennemi.
Antistrophe 10 : La justice doit être rendue. Le coryphée tremble en entendant ces prières mais souligne que le destin qui a longtemps tardé peut répondre aux suppliants.
« Oreste : - Arès contre Arès, Droit contre Droit.
Le coryphée : - Dieux, rendez JUSTICE à notre cause. »
Strophe 11 : Le coryphée continue d’exprimer son angoisse et sa souffrance (30)…
Antistrophe 11 : … et rappelle que c’est dans ce palais et par ses enfants que doit venir le remède.
Le coryphée prie les dieux souterrains d’accorder la victoire à ces enfants. Oreste implore son père pour qu’il lui accorde le pouvoir dans son palais pour que des festins y célèbrent sa dignité retrouvée. Electre demande que son épreuve soit transférée sur Egisthe ; elle versera alors pour son père ses libations nuptiales (31). Les deux frère et sœur implorent l’aide de Gaïa et de Perséphone puis évoquent le bassin où fut tué Agamemnon, le filet, les liens et le voile qu’ils ont utilisés pour le funeste complot dans l’espoir que ces outrages raniment son père. Oreste demande que la Justice vienne l’assister ou de pouvoir prendre ses adversaires par la même ruse.
« Envoie-donc la JUSTICE combattre à nos côtés
ou laisse-nous les prendre aux mêmes prises,
si toi qui fus vaincu tu veux vaincre à ton tour »
Electre veut que son père prenne pitié d’eux (32) et que la race des Pélopides ne s’éteigne pas. Oreste implore son père de répondre à leurs lamentations. Le coryphée approuve toutes leurs paroles : maintenant il faut agir.
Oreste veut maintenant savoir pourquoi sa mère a envoyé ces libations tardives et suspectes. Le coryphée lui parle des songes de Clytemnestre qui l’ont poussé à verser ces offrandes. (33). Elle s’est vue accoucher d’un serpent qu’elle abritait dans des langes comme un enfant et qu’elle nourrissait de son lait maternel. Mais avec le lait, il suçait un caillot de sang. « Il se pourrait que ce ne soit pas un vain songe » dit Oreste. C’est en s’éveillant de ce sinistre cauchemar que Clytemnestre a décidé d’envoyer ces libations funèbres. Oreste interprète ce rêve : c’est lui qui doit être le serpent qui la tuera (34)
« il faut qu’elle périsse, et moi, sous forme de serpent,
je la tue – voilà ce qu’affirme ce rêve. »
Le coryphée accepte cette interprétation et demande ce qu’ils doivent faire.
Oreste dit à Electre de rentrer au palais et au coryphée de ne rien dire afin que les meurtriers périssent à leur tour par la ruse comme l’a prédit Loxias. Lui et Pylade se présenteront au palais comme des étrangers suppliants (35) et qu’il verra Egisthe, il le tuera. Il renouvelle ses recommandations et en appelle à la protection d’Agamemnon (et/ou d’Hermès).

PREMIER STASIMON

Strophe 1 : Le chœur passe en revue les quatre éléments (36) et les puissances de terreur qui les hantent.
Antistrophe 1 : Mais qui dira les audaces de l’homme et le désir ardent qui régit le cœur de la femme ?
Strophe 2 : Le chœur invite à se souvenir d’Althaea, fille de Thestios qui décida la mort de son fils Méléagre en laissant se consumer le tison qui symbolisait sa vie.
Antistrophe 2 : Il cite un deuxième exemple de monstruosité féminine, celui de Scylla qui, par amour pour l’ennemi Minos, coupa le cheveu pourpre de son père Nisos, symbole de son pouvoir sur Mégare.
Strophe 3 : Avec ces exemples, le chœur maudit le palais où la femme complote contre son mari que ses ennemis respectent. Il préfère les foyers où les femmes font preuve de réserve, qui est leur vrai pouvoir dans l’oikos. (38)
Antistrophe 3 : Troisième exemple cité par le chœur : celui des femmes de Lemnos qui massacrèrent tous les hommes de leur île. Haïe des dieux, leur race a disparu de ce monde. On ne peut respecter ce qu’un dieu déteste.
Strophe 4 : Le glaive de la Justice frappe quand le droit et Zeus ont été outragés.
« Mais le glaive perce droit jusqu’aux poumons
et ses blessures sont aiguës
quand la JUSTICE frappe, quand le droit
s’est vu fouler aux pieds,
quand le suprême respect
de Zeus a été outragé malgré sa loi. »
Antistrophe 4 : Le destin a conduit le fils jusqu’au palais pour venger la souillure.
« Oui, le tronc de la JUSTICE reste ferme,
le destin a forgé sa lame.
Il a conduit le fils jusqu’au palais
pour venger la souillure,
cet enfant du sang qu’autrefois,
guidé par la glorieuse, insondable Erinye. »

DEUXIEME EPISODE

Entrent Oreste et Pylade.


Oreste frappe à la porte du palais et demande que quelqu’un vienne lui ouvrir.

Entre un esclave.


A l’esclave qui est venu ouvrir (39), Oreste demande d’annoncer à ses maîtres qu’il leur apporte des nouvelles. La nuit tombe. Que l’esclave fasse sortir l’un des seigneurs de la maison, la femme ou plutôt l’homme car il osera parler plus facilement avec lui.

Entre Clytemnestre.


Clytemnestre propose l’hospitalité aux étrangers (bon accueil, bains chauds, lit et présence de « regards justes »). S’il s’agit d’une chose plus grave, elle en fera part aux hommes.
Oreste se présente comme un étranger de Daulis en Phocide. Alors qu’il marchait vers Argos, il a croisé un homme qui l’a abordé sans le connaître : Strophios de Phocide [père de Pylade] (40) qui lui a confié un message. Il doit annoncer à ses parents qu’Oreste est mort et demander si son corps doit être ramené ou enseveli sur place. Pour le moment, ses cendres sont au fond d’une urne de bronze.
Clytemnestre dit [feint ?] son malheur à la nouvelle de cette ultime infortune. Oreste, son seul espoir de remédier à la bacchanale des Erinyes, a disparu.
Oreste aurait voulu apporter de meilleures nouvelles pour mériter l’hospitalité de ses hôtes mais il eût été impie de ne pas tenir parole et de ne pas mener cette affaire à son terme. Clytemnestre lui promet d’être néanmoins bien traité (41) mais puisqu’il est temps que les hôtes prennent leur repos, elle demande à l’esclave de conduire ces deux hôtes à leurs chambres et de leur fournir le nécessaire. Pendant ce temps, elle fera part de la nouvelle au maître de la maison.

Le chœur reste seul en scène.


Le coryphée invite le chœur des captives à soutenir Oreste car c’est maintenant que la ruse doit fonctionner et qu’Hermès fait sa ronde.

Entre la nourrice.


Le coryphée commente la situation : l’étranger semble être la cause d’un malheur. Kilissa sort du palais en larmes (42)
Kilissa, la nourrice d’Oreste raconte à son tour ce qui se passe. Clytemnestre a dit à Egisthe d’aller voir les étrangers. Malgré les apparences, Egisthe et Clytemnestre se réjouissent de cette nouvelle ce qui n’est pas le cas de Kilissa qui n’a jamais connu un tel chagrin, elle qui a veillé sur cet enfant depuis sa naissance. Cette mort met fin à tous les espoirs. (43)
Le coryphée lui suggère que tout espoir n’est pas perdu. Pour cela, elle doit dire à Egisthe de venir seul, contrairement aux ordres de Clytemnestre. (44)

La nourrice sort.


DEUXIEME STASIMON

Strophe 1 : Le chœur supplie Zeus d’accorder le succès aux « maîtres qui désirent voir régner la retenue ».
« Au nom du droit j’élève chaque mot :
Toi Zeus, puisses-tu veiller sur lui. »
Mésode 1 : Si Zeus accorde la victoire à Oreste, celui-ci le récompensera au double ou au triple.
Antistrophe 1 : Oreste s’est engagé dans son combat. Il faut le protéger jusqu’à ce qu’il l’ait achevé. (45)
Strophe 2 : Le coryphée supplie les dieux des profondeurs du palais (Hestia, Zeus, les Erinyes, les Pénates ?) d’effacer le sang du meurtre ancien par la justice.
« Allons […] le sang du meurtre ancien,
effacez-le dans la fraîcheur de la JUSTICE :
que le vieux crime n’enfante plus dans la maison. »
Mésode 2 : La prière du chœur s’adresse maintenant à Apollon en son temple de Delphes pour qu’il délivre le palais d’Oreste…
Antistrophe 2 :… puis à Hermès pour qu’il fasse apparaître tout ce qui est caché : « Que vienne l’assister aussi, au nom du droit, le dieu né de Maïa, le maître par excellence du souffle des vents favorables. »
Strophe 3 : Si ces vœux sont exaucés, les chants s’élèveront et tout ira bien. (46)
Mésode 3 : Le chœur adresse un message à Oreste. Si au moment d’agir Clytemnestre lui crie « mon fils », il devra lui répondre « oui, fils de mon père » et achever son ouvrage.
Antistrophe 3 : Qu’il garde le cœur ferme et fasse périr le coupable.

TROISIEME EPISODE


Entre Egisthe.


Egisthe a répondu au message qui l’invitait à venir. « Il paraît que des étrangers sont venus annoncer une nouvelle tout à fait indésirable, la mort d’Oreste ». Il feint de se lamenter sur cette nouvelle et demande si cette nouvelle est bien vraie.
Le coryphée confirme qu’il a entendu ce message et l’invite à aller interroger lui-même les étrangers.
Egisthe veut voir et interroger ce messager. A-t-il assisté à la mort d’Oreste ou se contente-t-il de rapporter un propos. Il saura définir ce qui est vrai. (47)

Egisthe sort. Le chœur reste seul en scène.


Le coryphée renouvelle sa prière à Zeus : c’est maintenant que va se jouer la victoire ou la défaite d’Oreste.
Une voix dans le palais lance des cris de deuil : « Eé- otototoï »
Le chœur demande quelle est l’issue du combat et le coryphée leur conseille de s’écarter et d’avoir l’air innocent[es] puisque désormais la lutte a rendu son verdict.

Entre un serviteur.


Il annonce la mort d’Egisthe (48). Il cherche Clytemnestre qui est menacée.
« Sa gorge est aujourd’hui sur le fil du rasoir
et je crois bien que la JUSTICE va l’abattre sous ses coups. »

Entre Clytemnestre.


Elle demande ce qui se passe, pourquoi ces cris dans le palais. « Je te le dis, les morts tuent le vivant » dit le serviteur. Clytemnestre comprend l’énigme : « nous avons tué par la ruse et la ruse va nous tuer ». Elle veut qu’on lui apporte une hache.

Le serviteur est sorti. Entrent Oreste puis Pylade.


Oreste annonce à sa mère la mort d’Egisthe et qu’il la rejoindra bientôt (49). Clytemnestre le supplie de l’épargner et Oreste hésite : « Que faire, Pylade ? Comment puis-je tuer ma mère ? »
Mais Pylade lui rappelle les oracles de Loxias et les serments qu’il a faits. Il ne doit pas trahir les dieux.
Revigoré par ces paroles, Oreste demande à sa mère de le suivre sur le lieu de son sacrifice. Clytemnestre essaie de plaider sa cause en invoquant sa piété filiale, le Destin (50), la malédiction, son adoption qui lui a laissé la vie sauve, les responsabilités de son père (51), la furie vengeresse des Erinyes. Oreste réfute un à un tous ces arguments. Clytemnestre comprend soudain son rêve : « Malheur – voilà donc le serpent que j’ai enfanté et nourri. » Oreste confirme son verdict :
« La terreur de ton rêve était un bon prophète.
Ton meurtre était interdit, à toi d’en souffrir l’horreur. »

Le chœur reste seul en scène.


Tout en pleurant sur leur double infortune [Clytemnestre et Egisthe ou Clytemnestre et Oreste ?] le coryphée espère que le palais ne sera pas détruit.

TROISIEME STASIMON


Strophe 1 : Le chœur annonce que la justice est passée et que l’exilé qu’Oreste a conduit son acte jusqu’au bout.
« Elle est venue, avec le temps elle a frappé les Priamides
la JUSTICE au lourd châtiment ;
il est venu jusqu’au foyer d’Agamemnon,
(52)
le double lion, le double Arès ;
il a conduit sa chasse jusqu’au bout,
l’exilé qu’annonçait Pythô,
celui qui s’élança sur les conseils d’un dieu. »
Mésode 1 : Le chœur invite à hurler de joie puisque la maison de leurs maîtres est libérée du couple criminel.
Antistrophe 1 : Hermès et Dikè, la fille de Zeus, sont venus et ont vaincu l’ennemi :
« Il est venu, celui qui songe à dissimuler son combat,
l’esprit rusé de la sanction ;
celle qui a touché son bras dans la bataille
est vraiment la fille de Zeus –
JUSTICE, ainsi la nomment les mortels
d’un nom qui lui convient,
et son souffle furieux a tué l’ennemi. »
Strophe 2 : Le chœur se félicite que l’oracle de Loxias Parnassien se soit réalisé et qu’elles puissent louer le ciel au lieu de servir des criminels.
Mésode 2 : Le palais peut enfin se relever. (53)
Antistrophe 2 : Bientôt, le temps viendra ramener le bonheur de nos vies dans ce palais dès que les purifications auront lavé les souillures.

DERNIER EPISODE (EXODOS)


Entre Oreste. Auprès de lui, les cadavres d’Egisthe et de Clytemnestre. Des citoyens d’Argos l’entourent.
Oreste présente les deux tyrans, unis dans la mort comme ils l’étaient dans le crime. Il présente le lien qui ligota les pieds et les mains de son père et le voile. Qu’ils les montrent au Soleil pour qu’il mesure les crimes de sa mère pour qu’il témoigne de son bon droit :
« afin qu’au jour de la JUSTICE il témoigne pour moi
que j’étais dans mon droit en recherchant la mort
d’une mère – la mort d’Egisthe, je n’en parle pas, (54)
puisqu’il subit la loi des adultères ; »
[En Grèce, la loi punissait en général de mort l’adultère]
Comment nommer cette femme qui médita cette horreur contre un homme dont elle avait porté les enfants ? Murène ou vipère ? Il montre encore le voile et le filet qui ont servi au meurtre. Il ne veut pas pour lui d’une telle épouse.
Le coryphée rappelle que l’on est condamné à souffrir à la hauteur de ses crimes.
En contemplant ce voile taché de sang, Oreste se lamente car il se sent souillé à son tour : « ma victoire m’a souillé, et qui me l’enviera ? » (55)
Personne ne peut échapper au malheur, dit le coryphée.
Oreste s’avoue « vaincu et emporté » par cet acte de justice que lui a dicté l’oracle :
« … oui, j’ai tué ma mère, non sans JUSTICE,
la souillure qui tua mon père, haïe des dieux,
et j’en ai puisé l’audace auprès du grand Loxias,
l’oracle de Pythô, qui m’assura
que j’agirais sans être coupable du crime,
et que sinon – je veux taire le châtiment,
nos arcs n’atteignent pas tant de souffrance. »
Il doit maintenant se présenter en suppliant (rameau et bandelettes) et quitter Argos pour retourner au temple de Delphes. Que les Argiens se souviennent de ces malheurs et qu’ils en parlent à Ménélas lorsqu’il reviendra. (56)
Le coryphée lui dit qu’il a bien agi et qu’il ne doit pas céder à l’amertume. Il a délivré la cité de deux serpents.
Oreste lui répond qu’il ne peut plus rester. Ce ne sont plus les visions qui le tourmentent mais les Erinyes, « chiennes furieuses de ma mère ». Le coryphée espère qu’Apollon le délivrera de ses obsessions.
Il sort.
Le coryphée lui souhaite bonne chance et annonce la troisième tempête sur le palais d’Argos (1. Les enfants dévorés- 2. L’assassinat d’Agamemnon – 3. La malédiction d’Oreste). « Où donc va s’accomplir, où va cesser et s’endormir enfin la furie de la ruine ? » (58)


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